Rencontre avec… Victor GREZES, sur le fait religieux en entreprise
Chaque mois, la Charte de la diversité propose à des acteurs de la diversité de s’exprimer sur le sujet de leur choix. Découvrez le point de vue de Victor GREZES, associé chez Convivencia Conseil sur le fait religieux en entreprise.
Le fait religieux en entreprise : un enjeu stratégique
En France, les convictions religieuses sont un sujet sensible et intime avec lequel il convient de prendre les plus grandes précautions. Le monde de l’entreprise n’y est pas imperméable, et le fait religieux peut concerner ou impacter de nombreux acteurs en son sein : ressources humaines, management, pôle diversité, pôle juridique, responsabilité sociétale de l’entreprise, qualité de vie au travail, etc. Afin d’accompagner les entreprises dans leur gestion de la diversité religieuse, des solutions existent. C’est notamment ce que propose Convivencia Conseil, cabinet ESS spécialisé sur la thématique.
La France est le pays le plus diversifié d’Europe en termes de religions et de convictions, et les entreprises sont naturellement le reflet de cette diversité. En outre, il s’agit d’une dimension qui peut constituer un atout pour l’entreprise, comme l’a montré l’étude McKinsey « Why diversity matters » de 2015 : plus une entreprise recrute des profils diversifiés, plus elle est rentable et innovante, en particulier sur les marchés très concurrentiels.
Il est naturel qu’il soit complexe de traiter des questions liées au religieux en entreprise, dans un pays traversé régulièrement par des controverses autour de la laïcité et du fait religieux, mais diverses enquêtes montrent néanmoins la nécessité de le faire. L’étude annuelle de l’Observatoire du Fait Religieux en Entreprise (OFRE) a par exemple rappelé en 2019 que 70% des managers observaient des faits religieux régulièrement ou occasionnellement au travail, que plus d’un cas sur deux nécessitait une intervention managériale, et que près de 10% des cas étaient bloquants et conflictuels (ce qui est faible mais non négligeable).
Comment faire de la diversité religieuse un atout pour l’entreprise ?
La pire des solutions pour une entreprise est de ne pas prendre de position officielle et homogène, et les risques peuvent être majeurs : discriminations, contentieux, problèmes de sécurité et d’organisation, inégalités dans les réponses managériales, bruit médiatique et mise à mal de l’image employeur.
En outre, l’absence d’une prise de position claire dans l’entreprise risque de renforcer le sentiment de solitude des managers : 60% d’entre eux regrettent ainsi de ne pas bénéficier du soutien nécessaire pour traiter ces questions (étude OFRE 2019). Les entreprises doivent donc les outiller comme elles le font sur d’autres sujets. Et il existe des solutions simples, légales et efficaces pour créer de la cohésion, anticiper et répondre aux revendications sans pour autant exacerber la thématique en interne.
Concrètement, que peuvent faire les entreprises ?
Il faut tout d’abord dépassionner le sujet et le traiter comme n’importe quel autre critère de diversité. Aujourd’hui, contrairement à ce que l’on pourrait penser, le droit encadre déjà la très grande majorité des situations.
En revanche, des marges de manœuvre sont laissées aux entreprises sur certains points, et c’est là qu’elles peuvent se faire accompagner pour se positionner. Par exemple, une entreprise peut interdire les signes manifestant ostensiblement une appartenance religieuse, mais seulement sous certaines conditions strictes (contact avec la clientèle, obligation de reclassement, inscription au RI, etc.). D’autres domaines encore sont laissés au libre choix des entreprises : pratique de la prière sur le lieu de travail, offre de restauration collective diversifiée, organisation du temps de travail, etc.
En définitive, la méthode pour gérer le fait religieux en entreprise est simple : commencer par un audit des pratiques de l’entreprise et des problématiques qu’elle rencontre (parfois sans être connues des DRH), adopter une position managériale claire et concertée pour anticiper et répondre aux différentes interrogations, faire connaître cette position en interne (guide, charte, formations, etc.) et ainsi (re)créer de la cohésion. Beaucoup l’ont déjà fait avec succès, autant les grandes entreprises : Total, Orange, Casino, La poste, EDF, DB Schenker etc. que les plus petites.
Pour les TPE/PME, une première action simple peut être tout simplement d’avoir un temps d’échange de 2h entre les responsables concernés par la thématique (Direction, RH, Production, Juridique, etc) pour un tour de table, une première remontée de terrain, un apport de connaissances, notamment juridiques, et une réflexion sur les risques et atouts pour l’entreprise. Cela peut permettre de rédiger une feuille de route avec différentes actions qui pourraient être menées (sensibilisations, formations, sécurisation du corpus juridique, etc).
Contrairement à ce que l’on pourrait croire, traiter de ce sujet ne créera jamais plus de tensions ou n’ouvrira pas une « boite de pandore ». Au contraire, c’est en posant un cadre qui rappelle autant ce qui autorisé que ce qui ne l’est pas, que les futures demandes seront reçues avec sérénité et qu’une réponse unifiée pourra être apportée, dans le respect des droits des salariés et des impératifs de bon fonctionnement de l’entreprise.
Convivencia Conseil, cabinet ESS spécialisé dans la gestion du fait religieux en entreprise a été récompensé ce 9 décembre (journée de la laïcité) d’une mention à l’occasion du prix de la laïcité de la République française pour son nouveau projet à découvrir ici : www.e-laicite.fr. Ce petit parcours d’une dizaine de minutes vous permet de mieux comprendre ce qu’est la laïcité en France et de tester vos connaissances. Il est anonyme et produit avec une technologie intelligente qui offre à chaque participant une expérience différente et personnalisée.
Par Victor GREZES, Associé chez Convivencia Conseil
Pour aller plus loin… le guide Gérer la diversité religieuse en entreprise, par Les entreprises pour la Cité.